Immigration: l'UMP accusée de
plagier le Front national
De Nadège PULJAK (AFP) – Il
y a 11 heures
Paris — En voulant réformer la politique d'immigration, l'UMP
s'attaque à un sujet sensible dans un pays qui s'est enrichi des flux
migratoires tout au long de son histoire, et se retrouve accusée de plagier le
Front national, à l'approche des municipales.
Déclarant que l'UMP allait déposer en 2014, année des élections
municipales, une proposition de loi sur une "nouvelle politique d'immigration",
son président Jean-François Copé s'est attiré les foudres aussi bien de la
gauche que du Front national. L'une et l'autre l'accusent de "calculs
électoraux" (Christiane Taubira) ou de "manoeuvres électoralistes" (Marine Le
Pen).
En cause essentiellement: le droit du sol pour les enfants
d'étrangers nés en France, que M. Copé voudrait réformer pour lutter contre le
communautarisme. Il ne serait plus question d'automaticité. Pourraient devenir
français à leur majorité, à condition qu'ils le demandent, les enfants dont les
parents sont en situation régulière, les autres n'ayant selon lui pas vocation
de toute façon à rester dans le pays.
Pour l'UMP, cette réforme (adoptée par Charles Pasqua, ministre
de l'Intérieur, en 1993, annulée sous Lionel Jospin en 1998), constitue l'un des
sujets les plus clivants entre droite et gauche.
Au sein même de la droite, elle ne fait pas l'unanimité. A l'UMP,
qui lui proposait d'inscrire à son programme de candidat en 2012 une telle
réforme, le candidat Nicolas Sarkozy avait opposé une fin de non-recevoir. "Le
droit du sol, c'est la France!", avait-il dit.
Au contraire de la Droite forte, premier courant de l'UMP
pourtant très sarkozyste, qui réclame un "droit du choix", ce qui revient à
supprimer le droit du sol, d'autres à l'UMP, tel le député Patrick Devedjian, y
sont fermement opposés.
Le maire de Bordeaux, Alain Juppé, appelle à ne pas "réagir
fébrilement" sur "un sujet extrêmement complexe". "L'UMP doit définir ses
positions, sans se demander en permanence si c'est du FN ou autre chose",
dit-il.
"C'est une mesure populiste, démagogique et idéologique, qui fait
perdre beaucoup de sympathie à l'UMP", déclare Arno Klarsfeld à l'AFP. Pour
l'ancien conseiller à Matignon et ancien président de l'Office français de
l'immigration et de l'intégration, "30.000 jeunes acquièrent la nationalité
française chaque année, dont 25.000 en en faisant la demande. L'automaticité ne
concerne que 5.000 d'entre eux", remarque M. Klarsfeld, qui refuse qu'on
produise des "CDD ou des stagiaires de la nationalité française".
'Compétition de populisme'
Pour Catherine Withol de Wenden, spécialiste des questions
migratoires, "l'UMP alimente la boîte à fantasmes". "Tous les travaux montrent
que l'immigration rapporte plus que ce qu'elle coûte", affirmait cette
chercheuse au CNRS mercredi à Libération.
Si Jean-François Copé prend à nouveau le risque de se voir accusé
de marcher dans les pas du FN, comme avec l'histoire du pain au chocolat, c'est
qu'à ses yeux, l'heure est grave.
Au point de lancer sur le site de l'UMP une pétition de soutien à
sa proposition.
Au moment où les sondages annoncent un Front national plus fort
que jamais aux prochaines élections, l'UMP entend ne pas lui céder le monopole
du combat "contre les tensions liées à la montée des extrémismes et du
communautarisme". "Pas d'eau tiède" pour repousser le FN, avait-il promis à
Perpignan, le 16 octobre.
Déjà en 2012, dans son livre "Manifeste pour une droite
décomplexée", il proposait "qu'on ne puisse plus devenir français sans
manifester sa volonté de l'être".
La proposition de loi qu'il veut déposer l'année prochaine
exigerait, outre "une plus grande fermeté face à l'immigration clandestine", une
France "rendue moins attractive socialement". M. Copé ne cesse de le répéter: la
famille de Leonarda Dibrani avait choisi de s'installer en France parce que
c'est "le pays le plus avantageux d'Europe" pour les immigrés, légaux ou non.
Son rival François Fillon le rejoint sur ce point, au risque de
s'exposer aux mêmes accusations, lui qui avait déjà essuyé de vives critiques en
plaidant pour le "moins sectaire" entre un FN et un PS (reconnaissant ensuite
une "maladresse").
"Dans certains quartiers, un communautarisme mortifère mine notre
cohésion nationale", a-t-il affirmé mercredi, lors d'une réunion publique à
Taverny (Hauts-de-Seine). Pour rendre "possible une "assimilation", il faut "une
nouvelle politique d'immigration".
Nicolas Sarkozy, partisan en son temps d'une grande fermeté en
matière de lutte contre le communautarisme et l'immigration illégale, voit
cependant dans la question du droit du sol "une compétition de populisme" entre
eux, a dit à l'AFP un de ses visiteurs.
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